[d’après VISITEZLIEGE.BE] Ancienne collégiale fondée au Xe siècle, incendiée en 1312. La nouvelle tour carrée, visible depuis de nombreux points de vue de la ville, a été achevée vers 1410. Dans le choeur et le vaisseau gothiques du XVIe siècle, vous pouvez admirer un calvaire du début du XVIe siècle, le mausolée d’Eracle, une belle statue de Notre-Dame de Saint-Séverin en bois polychrome (XVIe siècle, la chapelle du Saint-Sacrement et, ornée de médaillons de Del Cour (XVIIIe siècle) ainsi que des vitraux remarquables du XVIe siècle. A voir également, la chaire de vérité du début du XVIIIe siècle, les souvenirs de la Fête-Dieu, un magnifique maître-autel et, dans la crypte, un gisant en marbre noir de Theux.
Adresse : Rue du Mont Saint-Martin, 66 à 4000 Liège
Cathédrale éphémère, forteresse sacrée, une fondation détournée
Le siège épiscopal était implanté dans une cuvette profonde, ouverte à tous les dangers. L’évêque Eracle (959-971) décide son transfert. En 965, une nouvelle cathédrale Sainte-Marie-et-Saint-Lambert et un palais neuf s’élèvent sur la crête naturellement défendue du Publémont. Mais Notger (972-1008) abandonne le projet de son prédécesseur. Il revient au lieu saint -celui du martyre de Lambert- pour y bâtir la vaste cathédrale romane qui subsistera jusqu’à l’incendie en 1185 et il protège l’ensemble de la Cité par des fortifications. Il ravale l’église du Publémont au rang de collégiale. Il l’achève et la place sous le vocable de saint Martin de Tours, l’un des plus populaires de la chrétienté, mais aussi l’un des saints protecteurs des princes capétiens et des princes ottoniens. La dédicace à saint Martin révèle la politique de Notger, ses sentiments anticarolingiens et sa sympathie active dans l’avènement d’Hugues Capet. Incorporée au système défensif de la Cité, SaintMartin est désormais associée à la protection d’une de ses portes. Elle est devenue une ”forteresse sacrée”.
LA COLLEGIALE INCENDIEE
Août 1312. A Liège, c’est l’émeute. Les métiers, marchands et artisans -ceux qu’on appelle les petits-, soutenus par les chanoines de Saint-Lambert, se battent pour conserver une part du pouvoir fraîchement acquise. Un nombre
considérable de nobles liégeois cherchent asile à Saint-Martin. La foule en colère y boute le feu, condamnant les réfugiés à une mort atroce. La collégiale vit l’un des drames les plus effroyables de l’histoire liégeoise : il gardera le nom de Mal Saint-Martin.
L’ACTION DES GRANDS MECENES
La Renaissance à Liège est le fait du prince Erard de la Marck (1505-1538). La reconstruction de la collégiale, ruinée par les malheurs de 1312 et de 468, démarre à l’avènement de cet homme hors du commun. Partant du choeur, le chantier progresse lentement vers l’ouest et la tour, à laquelle le grand vaisseau va s’arrimer. Interrompus de 1530 à 1540, les travaux se poursuivent jusqu’à la fin du XVIe siècle, au milieu de tracas financiers qui expliquent peut-être la simplicité de l’architecture gothique de l’édifice. Les verrières remarquables de l’abside -l’un des plus beaux ensembles de vitraux européens du XVIe siècle- sont en cours de restauration. Elles sont attribuées à Richard Hoesman, un verrier liégeois qui, accusé d’hérésie, sera banni de Liège en 1533.
Grand bienfaiteur de Saint-Martin, le chanoine Jean Visbrocus a financé la construction des chapelles nord (vers 1580). Généreux mais prudent, il a fait réaliser son propre monument funéraire dès 1576. Un autre grand mécène, le chanoine Charles Haaken, doyen de 1924 à 1945, a enrichi son édifice de sculptures acquises sur le marché des antiquités. Parmi celles-ci, trois chefs-d’ oeuvre de la statuaire mosane des années 1500 : une sainte Anne Trinitaire, une Vierge et un saint Jean au Calvaire.
L’UNE DES PLUS BELLES VIERGES MOSANES – L’UNE DES PLUS VENEREES : Notre-Dame de Saint Séverin
La légende raconte qu’elle est l’oeuvre d’un Juif qui l’aurait sculptée pour sa femme catholique, cloîtrée chez elle par la paralysie. Elle est l’image même de la tendresse et de l’amour. Considérée comme miraculeuse à partir de 1631, elle a quitté l’église Saint-Séverin supprimée (1803) et trouvé refuge à Saint-Martin en 1805.
1996 : 750ème ANNIVERSAIRE DE LA FÊTE-DIEU
La création au XIIIe siècle de la fête du Saint-Sacrement est un temps fort de l’histoire de l’Eglise. Saint-Martin est au centre de cet évènement qui, de 1230 à 1264, met en scène Julienne -prieure de Cornillon-, Eve -son amie recluse à Saint-Martin- et quelques membres influents du chapitre de la collégiale. Aussi ce berceau de la Fête-Dieu accordera-t-il une importance toujours plus grande au culte eucharistique. Dans l’église reconstruite, une chapelle est réservée au culte et à la confrérie du Saint-Sacrement instaurée en 1575. Ce lieu, particulièrement saint, sera l’objet de soins constants. Les meilleurs artistes liégeois ont participé à sa luxueuse décoration qui, par la peinture et la sculpture, évoquait les préfigures, les figures et les symboles de l’Eucharistie. A partir du XVIIIe siècle, les jubilés de la Fête-Dieu sont fêtés avec beaucoup de solennité. Pour marquer le Ve centenaire, les chanoines font réaliser un maître-autel spectaculaire. Premier à Liège des autels “à la romaine”, il est conçu comme un somptueux trône d’exposition pour le saint Sacrement. Pour la célébration du 750e anniversaire de l’institution de la Fête-Dieu (1996), la basilique Saint-Martin fait peau neuve. Le gros-oeuvre, les vitraux et l’orgue de l’ancienne collégiale Saint-Pierre -oeuvre exceptionnelle de Jean-Baptiste Le Picard (1739-17 41 )- doivent être restaurés. Ce projet ambitieux de complète réhabilitation exige, pour aboutir, le concours de tous.
[d’après VISITEZLIEGE.BE] La collégiale. Fondée entre 1010 et 1015 hors les murs de la cité, cette ancienne collégiale, caractéristique de l’architecture rhéno-mosane, fut édifiée, en grès houiller, de la fin du XIe siècle(chœur) aux dernières décennies du XIIe siècle. Remarquable mobilier baroque liégeois. L’intérieur du massif occidental, exceptionnel par ses tribunes, a partiellement retrouvé son allure d’origine. Les fonts baptismaux. L’église Saint-Barthélemy renferme un des chefs d’oeuvre universels de la sculpture romane, considéré comme une des sept merveilles de Belgique : des fonts baptismaux en laiton (1107-1118) provenant de Notre-Dame-aux-Fonts, l’ancien baptistère de la cité. Cette église, accolée jadis à la cathédrale Saint-Lambert, fut détruite avec elle à la fin du XVIIIe siècle.
Adresse : Place Saint-Barthélemy à 4000 Liège
LA DERNIÈRE NÉE DES COLLÉGIALES LIÉGEOISES
Consacrée le 30 octobre 1015 par saint Héribert, archevêque de Cologne, et Baldéric II, évêque de Liège, l’église SaintBarthélemy est une fondation “hors-les-murs” du grand-prévôt de Saint-Lambert, Godesclac de
Morialmé. Témoin précieux de l’architecture romane de style rhéno-mosan, elle appartient
aujourd’hui à la triste catégorie des chefs-d’oeuvre en péril.
[La plaquette qui nous sert de source date de 1991 : entretemps, la collégiale a été magnifiquement restaurée]
LA GROTTE DE SAINT BERTREMIER
C’est sous ce nom évocateur de mystère que les chartes médiévales désignent la crypte extérieure aménagée devant le choeur oriental. Il en reste des vestiges. Souterraine ou en hors d’oeuvre , la crypte est fréquente dans les collégiales et les abbatiales du diocèse au XIe siècle. Elle sert au culte des défunts : les restes du fondateur ou les reliques d’un autre saint y sont conservées et sont l’objet de pèlerinages. La crypte de Saint-Barthélemy, ouverte par des couloirs sur les bras du transept, abritait les reliques de saint Ulbert.
A L’OUEST, UN DEUXIÈME CHOEUR
La construction de la collégiale romane s’est achevée vers 1170-1 190 par la réalisation du Westbau. Pour comprendre cet énorme massif de grès houiller, il faut faire abstraction du portail creusé dans l’axe au XVIIIe siècle. L’avant-corps n’était pas un lieu de passage ; il abritait le contre-choeur ou choeur occidental. Son décor de bandes lombardes (bandes verticales en saillie réunies au sommet par une frise d’arcatures) est caractéristique de l’architecture romane en pays mosan.
CHEFS-D’OEUVRE EN EXIL
D’aucuns sont partis, d’autres sont venus enrichir celle qui, sous l’Ancien Régime, était la plus pauvre des collégiales liégeoises.
Lorsque j’ai consenti, Mr le Maire, que le carillon du Val Saint-Lambert fut placé en l’église de Saint-Barthélemy, j’ai cédé aux sollicitations de MM. les marguilliers [membres du Conseil de Fabrique] contre mon intérêt personnel ; car je ne leur dissimulai pas que je donnerais volontiers une somme pour éloigner du lieu que j’habite le bruit monotone et presque insupportable d’un carillon.
Lettre du préfet Micoud d’ Umons au maire de Liège (30 avril 1807)
LES FONTS BAPTISMAUX, MIRACLE DE L’ART MOSAN
“Fondus avec un art à peine comparable“, prophétise en 1119 le vers 314 du Chronicon rythmicum. L’ oeuvre la plus célèbre et la plus étudiée du patrimoine artistique liégeois -les fonts baptismaux de Saint-Barthélemy- a jusqu’ici, reconnaissons-le, résisté à toutes les tentatives de rapprochement. N’est-ce pas l’essence même du miracle, “cette chose admirable dont la réalité semble extraordinaire“?
HELLIN
Archidiacre de Liège et abbé de Notre-Dame (1107-1118), Hellin a fait exécuter ces fonts pour son église. Voisine de la cathédrale, l’église Notre-Dame détenait à Liège le droit de baptême. Jusqu’à l’an mil, ce privilège fut même un monopole. Depuis Notger, elle le partageait avec l’église Saint-Adalbert en Ile. Les célèbres fonts seraient, croit-on, un coup d’éclat dans cette “guerre de prestige” que se livrèrent les deux baptistères aujourd’hui disparus.
CHEF-D’OEUVRE D’UN ORFEVRE
Le Chronicon rythrnicum ne mentionne pas l’auteur des fonts. La Chronique de 1402 l’identifie à Renier orfèvre de Huy. Assertion contestée par les spécialistes qui s’affrontent sur cet épineux problème de paternité. Mais tous s’accordent à reconnaître la perfection de l’oeuvre et de la technique utilisée, celle de la fonte à la cire perdue.
[d’après VISITEZLIEGE.BE] Collégiale fondée en 987 sous l’évêque Notger et intégrée dans le mur d’enceinte de la cité. La collégiale possède la plus ancienne nef romane liégeoise (1011). Seul le chœur a été reconstruit en gothique (XVe siècle). Décor intérieur baroque (fin XVIIIe siècle). On peut y voir le retable de la Passion, sculpture sur bois du XVIe siècle comptant environ 150 figurines, ainsi que les panneaux des volets peints par Lambert Lombard et représentant des épisodes de la vie de saint Denis.
Adresse : Rue de la Cathédrale, 64 à 4000 Liège
UNE TOUR FORTE DANS L’ENCEINTE NOTGÉRIENNE
Point stratégique de la rive gauche : c’est là que, passé le pont d’Ile, le bras secondaire de la Meuse rejoint le cours du fleuve. Fondation de Notger (en 987), la collégiale Saint-Denis fait partie du système défensif de la Cité. Voisine de l’enceinte urbaine, la tour massive et haute est une monumentale tour de guet. Comme pour Saint-Martin-en-Mont, le choix de la dédicace ne relève pas du hasard, mais bien de la politique menée par le grand prince-évêque : Denis, premier évêque de Paris, est lui aussi un saint protecteur des princes Robertiens-Capétiens soutenus par Notger.
CONTRASTES EXTÉRIEURS
Le profil curieux de Saint-Denis, au vaisseau bas dominé à l’est par un choeur élevé (le plus élevé de Liège) et à l’ouest par la haute tour, est le résultat de diverses campagnes de travaux. De l’édifice consacré en 1011 (une première église, consacrée en 990, aurait disparu dans un incendie treize ans plus tard), seuls subsistent la grande nef romane en grès houiller (elle est la doyenne des nefs liégeoises) et le bas du transept. La tour occidentale avec ses deux tourelles d’escalier a été vraisemblablement bâtie au début du XIIe siècle. Le beffroi, en bois recouvert d’ardoises, est généralement daté de la fin du Moyen Age. Le choeur, élevé en pierre de Lorraine entre 1352 et 1429, est la première et la seule étape d’un vaste projet de reconstruction qui n’a pas été mené à bien.
HARMONIES INTÉRIEURES
L’ancienne collégiale a conservé des témoins de chaque époque de son passé. Eglise à visages multiples, elle est à la fois romane, gothique et rococo. Et ces empreintes diverses, heureusement épargnées par les inconditionnels de l’unité de style, viennent d’être remises en valeur par une restauration exemplaire.
LE RETABLE DE LA PASSION
Cent cinquante figurines, parachevées dans les moindres détails, animent ce retable monumental, considéré comme l’un des meilleurs ouvrages de la sculpture brabançonne du XVIe siècle. Jadis placé sur le maître-autel, il se compose de deux parties distinctes : le haut retrace en six tableaux le drame de la Passion, tandis que la prédelle illustre la vie de saint Denis. Si l’ensemble est régi par les règles de l’art gothique, la prédelle fait une large part au décor renaissant. Pareilles diversités, qui apparaissent aussi dans les costumes et le traitement des draperies, permettent de supposer une réalisation en deux temps.
HOMONYMIE FÂCHEUSE
Dès le Moyen Age, Denis, premier évêque de Paris décapité au IIIe siècle avec Rustique et Eleuthère sur le Mons martyrum (Montmartre), a été confondu avec Denys l’Aréopagite, philosophe athénien converti par saint Paul (Ier siècle). Le retable n’échappe pas à la règle et juxtapose les épisodes de leur vie respective.
… ET SES VOLETS PEINTS
Ils étaient douze, peints sur les deux faces. Ouverts (quelle ampleur devait alors avoir le somptueux retable!) ou fermés, ils complétaient les épisodes de la vie du Christ et de la vie “des saints Denis”. Considérés dès 1700 comme le chef-d’oeuvre de Lambert Lombard (1505-1566), ils n’ont pas encore livré tous leurs secrets. Quatre volets sont conservés dans l’église.
LE BUFFET D’ORGUE LE PLUS ANCIEN DE LIÈGE
Placé au fond de la nef en 1589 (il a imposé la fermeture de la grande baie qui mettait en communication le premier étage de la tour et le vaisseau), il a, de tous temps, fait l’objet des meilleurs soins. S’il a perdu ses volets peints -ils illustraient bien sûr la vie de saint Denis-, il a gardé sa riche décoration typique des années 1600 (masques, bucrânes, mufles de lion) et quelques ajouts (les feuilles d’acanthe) louisquatorziens. Les férus d’iconographie s’attacheront surtout à son avant-corps : la balustrade de la tribune sculptée de saints ermites et le positif surmonté de trois petites statues, saint Denis céphalophore et ses deux compagnons d’infortune, Rustique et Eleuthère.
SAINT DENIS ENCORE ET LA VIERGE OMNIPRÉSENTE
Tout édifice religieux privilégie le culte de son saint patron représenté dans la sculpture décorative, la statuaire et la peinture. Mais à Liège, le culte patronal est partout contrebalancé par le culte marial particulièrement développé. La cathédrale Sainte-Marie-et-Saint-Lambert l’illustrait parfaitement avec ses deux choeurs opposés, dédiés l’un au martyr et l’autre à la Vierge. Dans la collégiale Saint-Denis, la Vierge et l’évêque de Paris étaient également associés et figuraient dès le Moyen Age à l’entrée du
choeur.
SAINT-DENIS, TERRE D’ACCUEIL
Provenant de paroisses supprimées au début du XIXe siècle, plusieurs oeuvres d’art de grande qualité ont trouvé refuge dans la nouvelle paroissiale Saint-Denis. Parmi elles, la statue miraculeuse de Notre-Dame-du-Pont-des-Arches et la très belle chaire de vérité de l’église Sainte-Ursule.
[HISTOIRESDELIEGE.WORDPRESS.COM, 5 novembre 2021, par Claude WARZEE] Le quartier de Pierreuse est situé derrière l’ancien palais des princes-évêques (1) , au-delà de la tranchée et du tunnel ferroviaires (2). Outre bien sûr la rue Pierreuse elle-même (3), il comporte la rue Volière (4), la rue Fond Saint-Servais (5), au Pèrî (6) et la cour des Minimes.
Les origines
La rue Pierreuse est une des plus anciennes voies de Liège ; au début du VIIIe siècle, déjà, elle constitue le point de départ du chemin vers Tongres. Selon Jean d’Outremeuse, les premières habitations auraient été bâties là peu après la mort de saint Lambert en 705, ce site élevé les mettant à l’abri des inondations fréquentes de la Meuse.
On admet généralement que le terme Pierreuse trouve son origine dans la composition du sol de la colline, lequel est exploité pour ses grès et ses schistes houillers. Le prince-évêque Notger, à la fin du Xe siècle, a profité de cette ressource géologique pour ériger une muraille autour de la cité. Neuf siècles plus tard, le creusement du tunnel ferroviaire a permis de redécouvrir d’anciennes carrières.
En outre, depuis les temps les plus anciens, les terrains non destinés à l’extraction de la pierre ou de la houille sont consacrés aux vignobles.
C’est avec une déclivité de 14% que la rue Pierreuse gravit la colline qui mène sur les hauteurs de Sainte-Walburge. On raconte qu’elle a été la première artère empierrée de la cité, pour faire face aux torrents de boue qui dévalaient la pente les jours d’intempérie.
Les premiers habitants de Pierreuse ont été des notables proches de la cour du prince-évêque et des tribunaux, mais aussi des exploitants de carrières et de fosses houillères. S’y sont aussi installées des auberges et brassines (débits de boissons).
Quand la rue s’est peuplée davantage, aux XIIIe et XIVe siècles, elles s’est complétée de divers métiers : boulangers, bouchers, barbiers, pelletiers, tailleurs… et même dentellières au XVIIe siècle.
En octobre 1520, c’est par la porte Sainte-Walburge et Pierreuse que Charles Quint a fait son entrée à Liège, invité par le prince-évêque Érard de la Marck.
La ferme de la Vache
Cette ferme remonte à la fin du XVIe siècle et a été remaniée aux XIXe et XXe siècles. Elle a été classée en 1981.
On raconte souvent que ce vaste domaine de bâtiments, prés et jardins, a été occupé dès 1620 par des Jésuitesses anglaises, remplacées par des Sépulcrines anglaises à la suite de la suppression de leur ordre, en 1630, par le pape Urbain VIII. Ces religieuses y géraient un pensionnat fréquenté par des jeunes filles issues des plus hautes familles liégeoises ou anglaises, un externat étant réservé aux élèves de condition plus humble. Elles ont déménagé dans le faubourg Saint-Gilles en 1650, expulsée de Pierreuse lors de l’aménagement de nouvelles fortifications décidées par le prince-évêque Maximilien-Henri de Bavière.
Dans un article publié dans la Libre Belgique en juillet 2013, Lily Portugaels s’appuie sur une publication de Bruno Dumont, de l’ASBL Vieux-Liège, pour défendre l’idée que le couvent des Sépulcrines se trouvait non pas sur le site de la ferme de la Vache, mais de l’autre côté de la rue Pierreuse, sur les terres dites du Crexhant (voir ce lien).
L’appellation ferme de la Vache remonte au XVIIIe siècle, époque où prospère l’économie laitière. Le site est devenu, en 1854, la propriété des Hospices civils, puis de l’Assistance publique, avant d’être intégré au patrimoine du CPAS de Liège, qui y développe un projet de réinsertion sociale par le maraîchage biologique.
XIXe-XXe siècle
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, à l’époque de la révolution industrielle, le quartier devient plus populeux. Les brassines, qui pratiquent souvent la prostitution, sont fréquentées par les militaires de la citadelle et contribuent à rendre les lieux ‘mal famés‘ (étymologiquement : de mauvaise réputation). L’escalier de la montagne de Bueren, terminé en 1880, a d’ailleurs été conçu pour permettre à la garnison d’accéder au centre-ville sans passer par la rue Pierreuse, qui lui est désormais interdite.
Au début du XXe siècle, la population reste de condition modeste et compte de plus en plus d’immigrés, tout ce petit monde disposant de ses commerces de proximité. Le quartier est décrit comme pittoresque et cosmopolite. Il intéresse les photographes, qui lui dédient des cartes postales, sur lesquelles les habitants, surtout les enfants, se plaisent à poser.
[WEEKEND.LEVIF.BE, 17 juillet 2023] Pourquoi cette charmille est-elle considérée comme l’une des plus charmantes d’Europe ? Réponse dans notre série d’été qui dégaine des extraits de l’ouvrage 111 lieux à ne pas manquer en Wallonie. Un must pour frimer lors de vos balades estivales.
Une charmille est une allée constituée de charmes plantés en double rangée et qui se rejoignent pour former un tunnel de verdure. Nommée également « le berceau de La Reid », celle de La Reid est la plus longue d’Europe et est considérée comme l’une des plus belles du continent. L’hiver venu, elle se dégarnit peu : c’est donc un lieu de promenade privilégié et romantique. Cette voûte végétale soutenue par une structure métallique a été conçue par Adolphe Cortin, un forgeron local de l’époque. Elle est composée de plus de 4 500 plants de charmes, qui sont pour la plupart centenaires.
La charmille fut commandée en 1885 par le propriétaire du domaine de Haut-Marais. Il la fit planter entre le hameau de Vertbuisson et Haut-Marais afin d’offrir une promenade à l’abri des rayons du soleil aux visiteurs les plus fortunés venus en séjour à la campagne. Si elle ne fait plus que 600 mètres aujourd’hui, elle était autrefois deux fois plus longue : elle fut endommagée en mai 1940 par les chars allemands – les charmes n’ayant pas été replantés. La charmille tomba peu à peu dans l’oubli, avant d’être classée en 1975, puis restaurée entre 1979 et 1985. Depuis, les étudiants de l’Institut provincial d’enseignement agronomique de La Reid l’entretiennent dans le cadre d’un projet pédagogique qui demande un mois de travail bénévole par an.
En 2016, une liqueur, la Merveille de la Charmille, fut créée à partir des bourgeons des charmes à la suite d’une collaboration entre une coopérative de Theux, Vins et Élixirs de Franchimont, et le syndicat d’initiative de La Reid.
[d’après CYBERLIEGE.BE] Le château des Quatre Tourettes appelé aussi Manoir des Quatre Tourettes est situé à Liège dans le quartier Saint-Léonard, au n°535 de la très ancienne rue Saint-Léonard. Elle se situe à environ 25 mètres en retrait de la voirie actuelle. Longeant la rue, une grille ancrée à deux piliers de pierre calcaire entoure un mur de brique. Un chemin herbeux mène au château.
Érigée en 1512, cette bâtisse est l’une des constructions particulières les plus anciennes de la ville de Liège dont les habitations non religieuses furent pratiquement toutes détruites en 1468 quand les troupes de Charles le Téméraire mirent à sac la ville. Le millésime 1512 est lisible par une inscription figurant sur le portail d’entrée […] La première propriétaire serait une demoiselle Alid Piete de Malle. […] Placée à environ 1,5 km au nord-est et à l’extérieur des remparts de la cité et du fossé Saint-Léonard, cette maison-forte faisait certainement fonction de poste défensif avancé situé le long de la rue Saint-Léonard qui conduisait à Herstal sans doute depuis le VIIIe siècle.
[CONNAITRELAWALLONIE.WALLONIE.BE] Située en retrait au fond d’une cour pavée, cette habitation exceptionnelle est datée de 1512 par un texte gravé autour de l’arc du portail d’entrée. Primitivement entouré de douves, l’ensemble en briques et calcaire a conservé son plan rectangulaire ainsi que bon nombre de ses attributs défensifs.
Élevé sur deux niveaux, le bâtiment est cantonné à l’angle sud-ouest d’une tourelle circulaire ornée de lésènes en partie supérieure. Les autres angles sont limités par des chaînes harpées jusqu’à la naissance des échauguettes (petites tourelles d’angle), protégées à l’origine par des poivrières (toits coniques). Les quatre éléments corniers sont percés de meurtrières.
La façade principale, au sud, présente deux larges travées percées à l’étage de baies à croisée dont les jours sont légèrement intradossés. Les piédroits sont chaînés et les appuis sont soulignés d’une fine moulure se prolongeant en bandeau ceinturant l’édifice.
Au rez-de-chaussée à gauche, le portail en plein cintre s’inscrit dans un encadrement rectangulaire. On y remarque encore la feuillure du pont-levis, c’est-à-dire l’entaille pratiquée dans l’épaisseur du mur qui recevait le tablier (partie mobile du pont-levis).
Une large clé armoriée surmonte l’inscription qui date l’ensemble :
Damoisel Alid Piete de Malle
l’an mil ccccc et XII
a faiect faire cte maison
Les autres faces, transformées, conservent plusieurs baies à traverse. Le bâtiment est couvert d’une toiture en bâtière de tuiles à coyaux et la tourelle, d’une toiture en terrasse.
De Liège à Verviers et de Verviers à Seraing, le cœur de la province de Liège bat au rythme de l’industrie et du tourisme. La région tente de prendre un nouvel envol en jouant de sa situation privilégiée au confins de trois pays et de trois langues. Traversé par la Meuse, l’Ourthe et la Vesdre, le bassin liégeois était au Moyen Âge un centre intellectuel et religieux de la plus haute importance avant de brûler au rythme des charbonnages.
Le charbonnage d’Argenteau-Trembleur fut mis en exploitation de 1816 à 1980. Dans le musée de la Mine, d’anciens mineurs emmènent les visiteurs dans les galeries d’exploitation, les installations de surface et les salles d’exposition retraçant l’histoire des techniques minières.
Localité éponyme du célèbre Pays et du fromage, la visite de Herve peut se limiter à celle de l’église paroissiale Saint-Jean-Baptiste. Le massif clocher en pierre est un donjon du XIIIe siècle aménagé au XVIIe. Autour de l’église subsistent plusieurs maisons des XVIIe et XVIIe siècles.
Née de la Vesdre, Verviers se remet doucement de la mort de l’industrie lainière qui fit sa richesse. La chapelle Notre-Dame-des-Récollets renferme une chaire de vérité, des confessionnaux du XVIIIe et une Vierge noire miraculeuse. La chapelle Saint-Lambert (XVIIIe-XIXe) exhibe fièrement un beau mobilier Louis XIV. Veillant sur la place du marché, l’élégant hôtel de ville Louis XVI avec son avant-corps saillant, ses colonne corinthiennes, son tympan et sa tourelle est un sommet de l’architecture principautaire. Le musée d’Archéologie et de Folklore est installé dans l’ancienne demeure du bourgmestre Joseph Cornet (1757) à la belle façade Louis XV ; l’Hôpital nouveau (1668) abrite les collections du musée des Beaux-Arts et de la Céramique ; les locaux de l’école supérieure textile accueillent le prémusée de la Laine.
Plus rien ne permet de supposer que le village perché de Limbourg ait été le centre d’un puissant duché. Si la forteresse a été démantelée, la rue principale est bordée d’un ensemble de très belles maisons du XVIIe.
Clermont-sur-Berwinne mérite une halte prolongée. Placée sur une motte près de l’ancien château, l’église gothique Saint-Jacques-le-Majeur servit de refuge aux habitants de l’alleu avant d’être reconstruite entre 1628 et 1632. Tout autour de la mairie, qui remplaça en 1888 l’ancienne halle aux plaids, la place du village aligne des maisons Louis XIII, XIV et XV. Du premier château de Clermont, subsistent une butte, les traces des douves et un joli porche gardé par une tour ronde. Un peu en dehors du centre, le château-ferme de l’Aguesse en Renaissance mosane combine un beau logis et une forte grange. En contrebas, le petit château de Crawhez (1551 ) est parvenu intact avec sa façade de brique et de pierre, ses pignons à redents, son toit asymétrique et ses curieuses boules de pierre.
Les bâtiments (XVIIe-XVIIIe) de l’abbaye Notre-Dame de Val-Dieu, fondée en 1216 par des moines cisterciens, dégagent une impression de calme. L’église néogothique recèle les stalles Renaissance de l’abbaye de la Paix Dieu d’Amay . De l’autre côté de la route, l’ancien moulin de l’abbaye possède toujours sa roue et son mécanisme.
Symboles des querelles linguistiques nationales, les Fourons sont une enclave limbourgeoise en province de Liège. Cela mis à part, les paysages bucoliques respirent le calme. À Fouron-Saint-Pierre, la belle commanderie de l’Ordre teutonique en Renaissance mosane dépendait d’Alden Biesen. Une agréable promenade conduit à la ferme et au castel Notre-Dame à Teuven, puis à Beusdaal dont le gros donjon en grès, les bâtiments à colombages et les douves forment un tableau qui mérite le détour.
Port fluvial situé au débouché de la Meuse, Visé est renommée pour son riche folklore et sa célèbre recette de l’oie. L’incendie du 10 août 1914 a épargné le chœur de la collégiale Saint-Martin qui abrite la châsse de saint Hadelin emportée de Celles. Le remarquable hôtel de ville mosan (1613) n ‘a pas eu cette chance, mais a été restauré en 1935.
À Seraing, meurt lentement l’une des entreprises les plus renommées du pays, les Cristalleries du Val-Saint-Lambert [en-tête] installées dans une ancienne abbaye cistercienne. Seule la salle capitulaire (XIIIe) a été restaurée ; les autres vestiges s’écroulent lentement, à côté de bâtiments industriels du XIXe.
Simple bourgade située aux confins de la Hesbaye, du sillon mosan et de l’agglomération liégeoise, Flémalle comprend plusieurs châteaux : le château du XVIIe ceints de douves occupé par la maison communale, le château de Hautepenne qui conjugue une aile Renaissance mosane et une austère tour médiévale en grès et surtout le château d’Aigremont érigé en même temps que la chapelle baroque Saint Mathieu (1715). Il arbore une façade classique avec des frontons triangulaires et une subtile alternance de travées en saillies soulignées par des chaînages de pierre. Le château Chokier, autre donjon médiéval transformé en demeure de plaisance, est construit à fleur de falaise. Du paysage industriel émergent la vieille tour Dame-Palade (XVIe) et l’église de Chokier (XVIIIe) au riche mobilier. Explorée en 1911, la grotte de Ramioul a ajouté à ses deux étages aux riches concrétions un musée moderne et vivant, le préhistosite. Le visiteur pénètre dans un campement paléolithique et peut expérimenter les techniques utilisées par nos ancêtres.
Cet article est extrait de l’ouvrage de Martine Dubois & Luc Helen, Belgique, une encyclopédie pratique, aujourd’hui indisponible, si ce n’est en antiquariat. Dans notre documenta, vous pouvez en télécharger une copie scannée avec reconnaissance de caractères. Vous y trouverez les adresses de contact des différents sites remarquables, tels qu’en… 1997, ainsi que les liens vers d’autres chapitres transcrits au départ du livre.
Trait d’union entre la rue de la Cité et la place du Marché, la rue du Pont fut, jusqu’en 1875, année du percement de la rue Léopold, la principale voie de communication entre le centre de la ville et Outremeuse. Au milieu d un quartier à l’intense activité commerciale, la rue du Pont est parallèle à la rue de la Goffe et à Neuvice, agréable voie piétonne.
Toutes trois sont reliées par la rue de la Boucherie et la venelle du Carré, appelée jusqu’au XVIe siècle ruelle “Malprové”. En 1590, elle devint “ruelle dite du Quarreit” puis “du Quarré” et, enfin, “du Carré”, altération du nom d’un ancien habitant de l’endroit. L’étroite ruelle, souvenir de voies resserrées du moyen-âge, est bordée de hauts murs ouverts de portes basses, issues secondaires des magasins voisins.
Le passant ne remarque pas toujours la façade n° 6 : les allèges raidies de croix de Saint-André et les baies à croisée de bois font de cette construction un excellent témoin de l’architecture de style mosan, en colombage et briques. La maison porte une date fraîchement peinte : 1690.
Le chroniqueur liégeois du XIVe siècle, Jean d’Outremeuse, relate que la rue, bâtie sur des arcades et des voûtes, servait elle-même de pont, ce qui aurait déterminé le nom de l’endroit. C’est peu probable, car aucun cours d’eau couvert n’existait à cet endroit. Cependant, une branche de la Légia parcourait la rue du Pont sur toute sa longueur, coulant en son milieu, dans une espèce de canal à ciel ouvert qui subsistait dans la seconde moitié du XVIIe siècle.
La rue est peut-être légèrement antérieure à la construction du premier pont des Arches réalisée sous l’épiscopat de Réginard (1025 – 1038) : en effet, une charte de 1026 cite comme témoin Lietminne de Ponte, certes un des plus vieux habitants de la rue. Celle-ci doit son nom à ce premier pont qui, posant sur sept arches en grès houiller, fut détruit en 1410 à la suite d’une forte inondation et son emplacement se modifia quelque peu. A l’origine, il se situait dans le prolongement de la rue, la reliant à la Chaussée-des-Prés. En 1911 , la première arche fut mise à jour dans la de la Cité, la seconde subsiste la cave du bâtiment portant le n°2, impasse du Vieux Pont des Arches (pour l’histoire du pont, consultez : Jean Lejeune, Les Van Eyck , peintres de Liège et de sa cathédrale, p. 127 et suivantes).
La rue du Pont était fermée, vers la rue de la Cité, par un arvô, entrée charretière, qui subsistait au XVe siècle. Elle occupait une situation privilégiée dans la vie économique de la Cité, à proximité du quai de la Goffe où arrivaient, par bateaux, le sel et de nombreuses marchandises. Comme de nos jours, la rue était bordée de magasins. Jean d’Outremeuse signale surtout les…
…fabricants et débitants d’instruments en bois tels que : cuillères, escuelez (écuelles), tailheurs (plats sur lesquels on coupe les viandes), saiserons (salières) et fiseais (fuseaux). On y voyait aussi des marchands de cordes, proches de la Goffe, des marchands de semences et des pots d’étainier…
cité dans Théodore Gobert, Les rues de Liège
Véritables publicistes, les marchands d’étains installés au Cheval d’Or à l’angle de la rue du Pont et du quai de la Goffe lancent en 1770 l’avis suivant :
Les Sieurs Evrard, Daiwail et Englebert, tous trois anciens Maîtres et Marchands potier d’étain, demeurant dans la rue du Pont, paroisse Sainte-Catherine, à Liège, donnent avis que, s’étant associés, l’on trouve maintenant chez eux, telles vaisselles qu’on souhaite, imitant celles d’argent du dernier goût, en oval et en rond , à contours et autres, en étain d’Angleterre ou la Rose, à aussi juste prix qu’on les peut tirer de l’étranger.
Aujourd’hui, le promeneur attentif peut retrouver dans la rue le même type de commerce. L’origine de la dénomination de la voie remonte au XIe siècle ; une certaine pérennité se retrouve dans son activité. Que reste-t-il du visage de la rue après les nombreux bouleversements qui marquèrent la ville et le quartier ?
Comme partout ailleurs, le sac de la Cité par Charles le Téméraire en 1468 ne laissa que ruines en la rue du Pont. En juin 1691, le maréchal français de Boufflers bombarda le quartier. Les boulets lancés de la Chartreuse incendièrent des centaines d’habitations dans le quartier de la Goffe ; l’hôtel de la Violette est un des premiers édifices détruits. Etienne Hélin fait justement remarquer que “comme la dévastation est limitée à un bande relativement étroite, les circonstances sont favorables à une reconstruction ordonnée. C ‘est bien ce que comprirent les contemporains et l’Historia leodensis les montre animés du désir de reconstruire ce que le feu avait consumé. Ils avaient le projet d’élargir les rues du quartier et ils élaborèrent un plan pour les travaux de première urgence” (Etienne Hélin, Le paysage urbain de Liège). La rue du Pont fut, comme ses voisines, reconstruite très rapidement et élargie entre 1691 et 1697.
Avant d’examiner la trentaine de maisons anciennes que conserve la rue, penchons-nous, comme le fit Théodore Gobert, sur quelques immeubles disparus.
Citons, par exemple, à l’angle de Féronstrée et de la rue du Pont, la Halle et la Boucherie des Vignerons démolie en 1839. Les bêtes attendaient leur tour d’exécution, à la suite l’une de l’autre, dans la rue. La boucherie était trop exiguë pour contenir tout le bétail.
A l’angle de la rue de la Boucherie, une belle demeure, témoin de l’architecture gothico-renaissance, fut démolie en 1884. En maçonneries mixtes, chaînés aux angles, les deux étages posaient sur un haut rez-de-chaussée percé de deux portes en plein cintre, des cordons-larmiers manquaient les niveaux éclairés de baies au linteau en accolade. Une frise de briques bordait la bâtière fort raide à croupe couverte d’ardoises.
Derrière cette habitation , se trouvait l’hospice fondé par Jean Mostard en 1336. Il était le fils de Jean de Velroux, dit Mostard ou Mostarde, l’un des principaux bourgeois de Liège et bourgmestre en 1309.
Au XIVe siècle, nombreux étaient les voyageurs qui désiraient séjourner en ville. Les hospices des Capucins, Saint-Jean-Baptiste et Saint-Julien entre autres ne suffisaient plus à héberger les malheureux sans toit. Jean Mostard légua plusieurs maisons et de nombreuses rentes pour assurer le bien-être et la survivance de l’hospice, dédié à la mère du Seigneur. Mais les Liégeois l’appelèrent surtout “hospice à la Moutarde“. Une chapelle desservait cet établissement qui accueillait les malheureux pendant trois nuits. Hébergés, ils étaient aussi nourris : du pain et du fromage accompagnés d’un pot de bière. Comme nous l’avons dit, cet hospice n’avait pas de façade à rue. Construit aux dépens de jardins, on y pénétrait par une allée en forme de corridor, certains bâtiments cependant s’ancraient vers la rue de la Boucherie. Après la mort de son fondateur, l’asile continua sa mission. En 1686, un texte nous raconte :
…on y reçoit les pèlerins de Saint-Jacques et de Notre-Dame de Lorette, y ayant sept lits pour les loger. L’on y chauffe aussi de pauvres pendant l’hiver et, avec ce qui reste, on distribue tous les ans aux pauvres de la paroisse Saint-André, au Noël et le jour du vendredi saint, du pain et une pièce d’argent à chaque, et cela par ordre des mambours de la dite église paroissiale.
Sous la Révolution française, les bâtiments devinrent propriété de la République. L’institution était complètement fermée le 13 juin 1797, les revenus allèrent à la commission des hospices civils.
De nombreuses enseignes animaient la rue, témoins du goût artistique et populaire de nos corporations. Le prince-évêque Maximilien-Henri de Bavière avait ordonné en 1657 que “toutes les enseignes de maisons, au lieu d’être suspendues, fussent retirées et appliquées contre les murailles dans le terme d’un mois...” C’est à ce moment-là que se multiplièrent au-dessus des commerces les enseignes en pierre sculptée. Th. Gobert et Ch. Bury, l’amoureux des enseignes liégeoises, nous énumèrent celles de la rue du Pont. Voici notamment la Main bleue, le Mouton noir, la Croix d’or, le Soleil, aux trois Mouettes, l’Ange d’or, aux Trois Harengs, le Cheval blanc, le Perron d’or, les Trois couronnes d’Or, le Coq d’Or, la Balance, le Lion rouge, le Bethléem… : sujets religieux, thèmes allégoriques, emblèmes naïfs ou parlant qui donnaient à la rue sa couleur et sa physionomie.
Laissons là les souvenirs. La rue du Pont conserve encore la plupart des nombreuses façades anciennes qui retracent deux siècles d’architecture liégeoise.
Le XVIIe siècle est figuré dans la rue par le n° 22, témoin de la construction en briques et colombage. Si le rez-de-chaussée est défiguré, les trois étages de hauteur dégressive, en légère saillie, sont intacts : les fenêtres, jadis à croisée de bois, sont entourées de croix de Saint-André. Six petites ouvertures se répètent sous la corniche à cymbales , semblable à celle de la maison Havart et du palais Curtius. Une haute toiture à double versant, couverte d’ardoises, coiffe la maison. En face de cette demeure, s’ouvre la rue de la Boucherie dont le côté droit offre un remarquable alignement de façades également en pans de bois, aux étages à « sèyeûte » ou encorbellement.
Du style Renaissance mosane, la rue conserve peu de souvenirs. Nous citerons en exemple le n° 48, mélange d’éléments de tradition médiévale comme la croisée ou le meneau de fenêtres en calcaire et la bâtière raide et des caractéristiques autres : maçonneries mixtes, les niveaux de proportion dégressive et la présence d’arc de décharge. Dans la seconde moitié du siècle, comme ici, les corniches à cymbales firent place peu à peu à de simples corbeaux de bois équarris.
Mais voici la fin du XVIIe siècle et 1691, date fatidique pour la ville, marque un tournant dans l’évolution de l’architecture civile. C’est l’époque, nous l’avons remarqué, d’une reconstruction rapide et intensive, caractérisée par l’emploi généralisé du calcaire et un abandon partiel des styles locaux avec le rejet de la croisée de pierre. La rue garde deux témoins de cette époque : le n° 19 à l’enseigne du Perron d’Or, datée de 1687 et le n° 25 Au Coq d’Or. Dès l’abord, un élément nouveau est significatif : la sculpture est intimement mêlée à l’architecture. Au niveau des allèges, c’est-à-dire sous le seuil des fenêtres, d’habiles sculpteurs représentent des rinceaux de feuilles d’acanthe, des grappes de fruits, des couronnes de laurier, des palmes agrémentées de rubans. Albert Puters (Architecture privée au pays de Liège) voit dans ce nouveau goût liégeois l’ influence du sculpteur Jean Del Cour (1627-1707) et il suppute la trace de son ciseau dans les façades de la rue du Pont, façades de calcaire où l’on ne sait s’il faut plus admirer la qualité du motif ou la sobriété de la réalisation. Toute proche, Neuvice présente encore quelques très beaux témoins de cette façon de construire à la charnière des XVIIe et XVIIIe siècles.
Voici la première moitié du XVIIIe siècle. Le visage des maisons se modifie et s’éclaire. Au début, l’influence du style mosan est forte : des cordons dans le prolongement des croisillons disparus accentuent l’horizontalité des façades. Les piédroits des baies se prolongent enserrant les allèges qui de plus en plus seront ornées de cartouches aux coins écornés. Une modification importante intervient aussi dans le linteau des fenêtres, maintenant frappé d’une clé. La rue du Pont nous en offre un bel exemple en la maison portant le n° 9 et datée de 1720. Les trois étages sont largement éclairés de fenêtres jointives au linteau simulant tas de charge, les piédroits sont coupés de refends, enserrant un seuil mouluré. Entre les cartouches écornés, l’enseigne présente un mouton noir, de belle qualité. Tout le long de la rue, l’évolution architecturale s’illustre : ici, au n° 4, les linteaux s’échancrent, c’est le milieu du siècle ; là, une clé devient passante (n° 14)…
Une maison également du XVIIIe siècle, le n° 43, en calcaire peint, présente encore au passant deux enseignes : l’une agrémentée de deux épées croisées et enrubannées, l’autre frappée d’une colombe entourée de rayons, peut-être le Saint-Esprit ? Selon Th. Gobert, cette maison fut souvent rebaptisée A l’épée, Au nom de Jésus au XVIIIe siècle, Au Saint-Esprit, toujours au XVIIIe siècle et enfin A la Croisette au XIXe siècle.
La longue demeure portant le n° 26-28 remplace deux maisons : celle du Pourceau d’Or du XVIe siècle à 1660 et une autre A l’Etoile et A l’Axe du Moulin, dès le XVIe siècle. Aujourd’hui, c’est une longue demeure construite vers le milieu du XVIIIe siècle. La façade à rue est entièrement en calcaire. Au-dessus du portail primitif disparu lors de l’aménagement d’un magasin, une belle baie en arc en plein cintre s’orne d’une clé accostée de guirlandes.
Notre promenade architecturale se termine dans cette rue qui présente aussi des témoins du XIXe siècle et du XXe. Quittons-la sur cette vue de 1895 (ci-dessous). A l’aube d’un siècle trépidant, deux charmantes jeunes filles font leurs emplettes à la Cloche d’Or, un petit chien noir au milieu de la rue ne craint pas les calèches. Regardez ce jeune dandy, en face de la Pipe d’Or : il brandit fièrement une canne, protégé des ardeurs du soleil par un canoter enrubanné. Attardons-nous un instant devant les deux vitrines de gauche : porcelaines, verreries et cristaux exposés à la vue de tous, attirent le passant…
Ann CHEVALIER & Marie-Ange REMY
Charles BURY, Les enseignes liégeoises en pierre sculptée, dans le Bulletin de la Société royale le Vieux Liège, n° 158, t. VIII, juillet-septembre 1967.
Théodore GOBERT, Liège à travers les âges. Les rues de Liège, t. V, Liège, G. Thone, 1928.
ETIENNE HELIN, Le paysage urbain de Liège avant la révolution industrielle, Liège, Ed. de la Commission communale de l’Ancien pays de Liège, 1963 (Coll. • Documents et Mémoires », fasc. VI).
L’Inventaire du Patrimoine monumental de la Ville de Liège. Liège, Soledi, 1974.
Jean LEJEUNE, Les Van Eyck, peintres de Liège et de sa cathédrale. Liège, G. Thone, 1956.
Albert PUTERS, Architecture privée au pays de Liège. Liège, Printing C0, 1940.
L’intégralité du magazine La Vie liégeoise n°10 d’octobre 1974, d’où est extraite cette fiche de notre topoguide, est disponible au téléchargement (PDF avec reconnaissance de caractère) dans la documenta…
[RTBF.BE, article du 8 juin 2022] Gros plan sur une rénovation dont le financement est plutôt inhabituel. La Ville de Limbourg en région liégeoise est fière de faire partie des plus beaux villages de Wallonie. Et le lieu sera encore plus attrayant avec la rénovation de la place principale. Les travaux sont terminés et ils ont en partie été payés par les habitants qui pouvaient acheter quelques mètres carrés de pavés.
Participation citoyenne
“Comme je suis née le 24 décembre, explique Huberte Braham, habitante de Limbourg depuis l’âge de 9 ans, à Noel, sur l’arbre j’ai eu un beau cadeau. Un de mes fils m’avait acheté un pavé. C’était vraiment une surprise. J’étais émue“. Elle possède désormais un pavé à son nom sur la place de son village, juste devant la maison dans laquelle elle a vécu durant des années.
La rénovation de cette place à coûté 1.5 million d’euros. La Wallonie et l’Europe ont financé une grande partie des travaux. Les habitants ont, eux, pu acheter 1 mètre carré pour une valeur de 134 euros.
“Il n’y a pas que des habitants, souligne la bourgmestre de Limbourg. Cela a quand même été soutenu par des personnes qui habitaient à l’extérieur de la commune. Et donc on a rassemblé plus ou moins 60.000 euros de fonds grâce à cette opération. C’est une petite goutte d’eau symbolique, mais qui, je pense, à permis à donner de la crédibilité à la place, de permettre aussi d’avoir une visibilité un peu créative car c’est une opération qui n’a pas lieu partout et certainement pas en Wallonie.“
Pour la rénovation, il a fallu rajouter 2/3 des pavés. Ceux-ci ont été péchés directement dans la Vesdre. Limbourg fait partie des plus beaux villages de Wallonie. Alors, ici, les week-ends, il y a du monde. Et c’est parfois compliqué pour les habitants, comme l’explique Véronique Klein, riveraine : “On a énormément de touristes qui ne respectent pas forcément les parkings extérieurs du village. On a donc vite une place encombrée de véhicules. Beaucoup d’enfants jouent sur la place et on a la crainte évidemment qu’il se passe quelque chose.“
Les autorités ont conscience du problème, confirme l’échevin du tourisme à Limbourg : “Au-dessus de la place, dans le cadre de la rénovation, on a posé des potelets rétractables qui pourront empêcher les voitures de venir stationner pendant les périodes d’affluence touristique. Les riverains pourront continuer à stationner sur la place. Un jour par mois, ceux-ci ne seront pas autorisés à stationner. Ce sera un jour sans voiture. La place sera encore plus belle.“
La volonté est de redonner une vraie dynamique au village. Et ce sera aussi grâce à Huberte, à George, à Paul et à tous les autres.
La villa L’Aube de Gustave Serrurier-Bovy est située dans le Parc de Cointe, 2 avenue de Cointe à B-4000 Liège.
Construite en 1903 sur les hauteurs de Cointe, la villa L’Aube constitue un des rares témoins de la production de l’architecte Gustave Serrurier-Bovy, plus connu pour son mobilier et ses aménagements intérieurs. Cette habitation personnelle constitue le manifeste artistique de Serrurier-Bovy qui rompt avec les villas anglaises alors à la mode et dessine un volume homogène sous une toiture en bâtière à larges débordements, ouvert sur le jardin. Les percements variés reflètent la disposition intérieure des pièces et seuls se détachent un auvent, la véranda de la salle à manger, la terrasse couverte ou la loggia du bureau. L’Aube, qui donne son nom à l’habitation, est représentée sur la façade ouest dans une mosaïque exécutée d’après un carton d’Auguste Donnay. Elle constitue le seul élément qui ne porte pas directement la signature de Serrurier-Bovy, au cœur de ce qu’il faut comprendre comme une œuvre d’art total. L’aménagement intérieur est pensé dans tous les détails d’une décoration faite entre autres de vitraux figuratifs ou géométriques, de bandeaux de brique vernissée ou de mosaïques géométriques de sol. Le mobilier dessiné par le premier propriétaire de l’Aube porte enfin la trace du goût de son concepteur pour les lignes simples et la géométrisation des formes, dispositions qui annoncent à leur manière l’Art déco. [Institut du Patrimoine wallon sur CONNAITRELAWALLONIE.WALLONIE.BE]
Patrimoine exceptionnel de Wallonie : la villa L’Aube a été classée comme monument (avec zone de protection) le 12 décembre 2001.