[d’après VISITEZLIEGE.BE] C’est sous l’épiscopat d’Éracle que fut fondée l’église Saint-Paul à la fin du Xe siècle. Elle fut reconstruite dans le style gothique à partir du XIIIe siècle. À la fin du XIVe siècle, presque l’intégralité de l’église était réédifiée à l’exception du cloître, édifié entre le XVe et le XVIe siècle, et de la tour. Cette dernière, commencée à la fin du XIVe siècle était encore inachevée lorsque la Révolution de 1789 éclata. En 1803, alors que la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert n’était plus qu’un vaste champ de ruines, Saint-Paul fut élevée au rang de cathédrale à la suite du Concordat. C’est peu après cet événement que le clocher fut terminé. Par sa forme, il évoque celui de la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert disparue. L’église a conservé de nombreuses œuvres remarquables dont des vitraux du XVIe siècle ou encore le magnifique Christ gisant de Jean Del Cour daté de 1696. L’intérêt de la cathédrale ne se limite pas à la seule église, le cloître mérite aussi le détour. Outre de nombreuses pierres tombales dont celles d’anciens princes-évêques, il abrite également le Trésor de Liège.
Adresse : 98 rue Charles Magnette à 4000 Liège

Eracle, premier promoteur immobilier de l’île

Développer une cité, c’est d’abord lui donner des possibilités d’extension. L’évêque Eracle (959-971) en est conscient. Son choix se porte sur l’Ile, vaste terre marécageuse et inhospitalière qui s’étend entre les deux bras de la Meuse. Entre 965 et 971, il fonde la collégiale Saint-Paul en un lieu, dit la légende, indiqué par une chute de neige… en plein juillet. Cette nouvelle institution, dotée d’un domaine de douze hectares, est le premier agent du peuplement rapide de l’Ile. Un nouveau quartier va naître à proximité du centre de la Cité. D’autres établissements religieux s’y implantent -la collégiale Saint-Jean, l’abbaye bénédictine de Saint-Jacques, de nombreux couvents- entraînant l’installation de laïcs dans leur voisinage. L’abondance de l’eau, indispensable à l’industrie, attire les artisans, et le commerce se développe dans ce lieu de passage obligé vers Avroy, Saint-Gilles et les terres de Bêche. En 1050, les deux ponts d’ile et d’Avroy sont en place. Quatre paroisses desserviront une population toujours croissante : Saint-Martin-en-Ile (près de Saint-Paul), Saint-Adalbert (près de Saint-Jean l’Evangéliste), Saint-Remy (près de Saint-Jacques) et Saint-Nicolas-au-Trez (Vertbois).
UNE GRANDE ÉGLISE GOTHIQUE…
D’est en ouest, par tranches successives, la collégiale romane cède place à l’édifice gothique. La reconstruction, entreprise vers 1232 côté choeur, s’achèvera côté tour deux siècles plus tard. L’ampleur du volume intérieur, la pureté des lignes, la sobriété du décor sculpté font de SaintPaul l’un des plus beaux monuments gothiques de notre pays. Le choeur profond terminé par trois absides polygonales (début du XIVe siècle) ouvre sur le transept large mais non saillant. Le vaisseau à trois nefs longues de sept travées est encore élargi par les onze chapelles latérales.
…RESTAURÉE A L’ÉPOQUE ROMANTIQUE
Pour qui découvre Saint-Paul de l’extérieur, la belle sobriété du style gothique primaire n’est pas évidente. Sa physionomie s’est modifiée. A l’ouest, la tour a été surhaussée en 1811 d’un étage coiffé d’une haute flèche et de quatre clochetons rappelant la silhouette de la tour de l’ancienne cathédrale. L’horloge et le carillon de Saint-Lambert y sont logés. Au nord, la façade a fait l’objet, dès 1850, d’une complète restauration qui a abouti à un véritable embellissement décoratif. Nés de l’imagination de notre Viollet-le-Duc liégeois, galeries, pinacles et crochets sont venus surcharger l’architecture primitive. Le même Delsaux affirmait pourtant “la main de l’architecte restaurateur doit être imperceptible !“
Restaurer un édifice, ce n’est pas l’entretenir, le réparer ou le refaire, c’est le rétablir dans un état complet qui peut ne jamais avoir existé.
E. Viollet-le-Duc (1856)
VERS LES TEMPS MODERNES
1468. C’est “l’année où Liège périt” par le feu et le sang, victime du Bourguignon. C’est aussi la fin d’un monde, le Moyen Age. Un monde nouveau va naître, celui de la Renaissance. Dans l’art, la tradition fait mieux
que résister, produisant des “réalisations spectaculaires qui prolongent, en plein XVIe siècle, la splendeur d’une époque révolue” (J. Stiennon). Le plus souvent entre l’ancien et le moderne, le compromis s’installe. Un dernier témoin de la survivance du style gothique au XVIIe siècle. Offerte en 1643 par le doyen Paul Simonis, la double porte en laiton, oeuvre d’un fondeur de Dinant, Pierre Chaboteaux, fermait jadis l’entrée du choeur. Elle a été conçue pour s’intégrer harmonieusement dans un jubé ancien d’allure gothique. Ceci explique la présence de l’arc brisé et trilobé dans un décor mi-Renaissance mi-Baroque.
LA NOUVELLE CATHEDRALE DE LIEGE
Septembre 1797. La collégiale a vécu. Son chapitre est supprimé. Les biens meubles et immeubles sont nationalisés et vendus. L’église est convertie en abattoir et en boucherie. Novembre 1802. Saint-Paul est rendue au culte. Mais celle qui succède à l’illustre cathédrale Saint-Lambert a perdu beaucoup de ses trésors anciens. Les efforts répétés du nouveau chapitre cathédral (huit chanoines titulaires, portés à douze en 1842, plus un nombre variable de chanoines honoraires) et l’arrivée de “chefs-d’oeuvre déplacés” lui rendront son ancienne magnificence.
DE REMARQUABLES FIGURES DU CHRIST…
La présence du crucifix à l’entrée du choeur s’est généralisée dans tout l’Occident chrétien dès le Moyen Age. Souvent encadré de la Vierge et de saint Jean, parfois même d’autres témoins du Golgotha, le Christ en croix surmonte la clôture qui sépare le clergé officiant dans le choeur des laïcs en prière dans les nefs.
La première oeuvre connue -et l’une des plus parfaites- du sculpteur Jean Del Cour (1631-1707). Coulé dans le bronze par Perpète Wespin de Dinant en 1663, le Christ se dressait sur le Pont-des-Arches. Il a gardé, à l’épaule droite, les marques du bombardement de Liège par les Français en 1691.

“Un tel cadavre ne donne pas l’impression de la mort, il est proche d’une glorieuse résurrection et s’il porte les marques de la crucifixion, si les pieds en gardent encore la crispation, rien n’en altère la majesté” (R. Lesuisse). Cette émouvante figure du Christ ornait le monument funéraire des époux Walthère de Liverlo et Marie d’Ogier au couvent des sépulchrines dit des Bons Enfants.
…de la Vierge…

La Vierge assise à l ‘Enfant porte le nom latin de Sedes Sapientiae : Marie trônante est elle-même le Siège (Sedes) de la ·Sagesse (Sapientiae), c’est-à-dire l’Enfant Dieu. La Sedes est l’un des thèmes favoris des sculpteurs mosans des XIe, XIIe et XIII siècles. Celle-ci se distingue de ses soeurs par l’allongement de la silhouette. Elle provient d’une église paroissiale disparue : Saint-Jean-Baptiste en Féronstrée. Le choeur oriental de la cathédrale Saint-Lambert était dédié à la Vierge. Pour orner le maître-autel “le plus riche et le plus magnifique … et le plus dispendieux qui soit dans les pays d’alentour“, l’archidiacre Lambert de Liverlo fit appel au plus doué des peintres liégeois, Gérard de Lairesse (1640-1711). Quand la toile arriva d’Amsterdam – Lairesse y vivait depuis plus de 20 ans, chassé de Liège à la suite d’une fâcheuse aventure -, d’aucuns lui reprochèrent d’être par trop profane.
…et du Diable

La troublante beauté de cet adolescent est l’image même de la tentation. Mais la réalité peut être subversive. Les chanoines de Saint-Paul écartèrent cet ange déchu au profit d’un Lucifer tourmenté, plus proche de la tradition.
C’est ce dernier que le visiteur découvre au pied de la chaire de vérité, spectaculaire réalisation en chêne et en marbre du sculpteur bruxellois Guillaume Geefs (1838-1848) :
DANS LE CLOÎTRE GOTHIQUE (1445-1535), LE PLUS FABULEUX DES TRESORS LIEGEOIS
L’ivoire des trois résurrections
Il fait partie du groupe des ivoires liégeois à petites figures et il charme par son caractère narratif. Il doit être lu en boustrophédon (de gauche à droite, puis de droite à gauche, puis à nouveau de gauche à droite). Il montre le Christ, suivi de disciples ressuscitant la fille de Jaïre, le fils de la veuve de Naïm et Lazarre.
La Vierge Hodegetria
Hiératique et portant l’Homme-Dieu, la Vierge Conductrice (Hodegetria) est l’un des types de prédilection de l’art byzantin. Celle-ci, qui appartenait au trésor de Saint-Lambert, fit partie de l’exposition solennelle des reliques en 1489.
Le reliquaire de Charles le Téméraire

Offert en 1471 en expiation du sac de Liège (1468), cet admirable joyau contient un doigt de saint Lambert.
Le buste-reliquaire de saint Lambert
Dernier des grands chefs-d’oeuvre d’orfèvrerie religieuse du Moyen Age. Commandé par le prince-évêque Erard de la Marck, habile politique et mécène fastueux, il est l’ oeuvre de l’orfèvre aixois Hans von Reutlingen (1508-1512). Parce qu’il abrite le crâne du saint patron du diocèse, il a été, jusqu’à la Révolution, le trésor le plus insigne de la cathédrale Saint-Lambert. Sauvé de justesse, il a été rendu aux Liégeois par Bonaparte en 1803.
[INFOS QUALITE] statut : validé | mode d’édition : dématérialisation, partage, correction et iconographie | source : visitezliege.be ; Les collégiales liégeoises (n° 5 – Liège : Histoire d’une église, 1991) | contributeur : Patrick Thonart | crédits illustrations : © visitezliege.be ; © dp.
A Liège, encore…
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